lundi 30 mai 2016

Humanimal




Les scientifiques, parfois, sont doués pour enfoncer des portes ouvertes, ne trouvez-vous pas ?
Ou bien, peut-être, sont-ils simplement en retard d’une guerre sur les intuitifs ?
Certaines études et recherches me font sourire, ou bien pleurer quand je considère le fait que les êtres humains en aient besoin pour prouver ce que leur instinct ou leur intuition leur aurait déjà confirmé s’ils y prenaient garde, s’ils n’étaient pas à ce point dénaturés, étrangers aux perceptions dites « primitives » et pourtant primordiales reléguées au statut de « sensibleries ». L’homme a favorisé l’intellect et le mental aux dépens de sa nature, de la Nature.
Par exemple, l’on trouve dans les magazines et sur les réseaux sociaux de plus en plus d’articles mentionnant des recherches et études scientifiques – c'est-à-dire des observations menées de manière purement intellectuelle et mesurables par des personnes diplômées dans les domaines concernés – sur les facultés émotionnelles des animaux ou sur un éventuel aspect « social » de leur vie.
Dans le parc du Yellowstone, au Wyomming, USA, des bisons ont été récemment observés procédant à une sorte de rituel de deuil autour d’un veau décédé suite à une attaque de loups. Tour à tour, les adultes marchant en procession autour du corps du veau venaient le lécher avant de rejoindre le troupeau. L’observateur parle de « rendre hommage au mort » dans cet article du « Yellowstone Bears ».
Dans les réactions, les scientifiques s’étonnent car ils n’avaient observé ce type de comportement que chez des mammifères plus « intelligents » comme les chiens, les dauphins et les éléphants.
J’ai été personnellement témoin d’un comportement similaire de la part de chevaux envers une jument décédée d’un AVC en prairie, au milieu d’eux.
Dernièrement, je suis tombée sur Facebook sur un petit article de sudinfo.be accompagné une vidéo donnant à voir le bonheur du moment présent et la tendresse au sein d’un troupeau de vaches normandes, parlant même de vie sociale et intime.
(La vidéo est visible ici : https://www.youtube.com/watch?v=jddPPmJQY8o)
Il ne s’agit pas d’un article scientifique mais de l’observation d’un amateur. Cependant, j’imagine les réactions professionnelles telles que j’en ai souvent entendues : si les vaches se lèchent, c’est parce qu’elles aiment le sel que contient la sueur. 

Pourtant, une étude récente parue dans le Science Daily s’intéresse à l’empathie dont font preuve certains animaux. Il s’agissait de campagnols, pourtant de « simples » rongeurs. Leur niveau d’ocytocine, dans  certaines situations, y est mentionné comme étant la preuve que cet animal est capable de ressentir de l’amour, soulevant tacitement le problème suivant : les neurotransmetteurs provoquent-ils l’émotion et le comportement associé ou le cerveau ne fait-il que métaboliser – transformer en ressentis physiques – ce que la conscience, l’âme, éprouve ? Dans le premier cas, la question de savoir si les animaux ont une conscience reste à débattre. Dans le second, elle ne se pose même pas.
Les humains, pour la plupart étrangers à leur propre conscience, attendent donc une étude scientifique prouvant que les animaux en ont une, de conscience, histoire de savoir, en fin de compte, comment les considérer ou les traiter.
Alors que s’ils interrompaient un moment leur frénésie, respiraient profondément, écoutaient les battements de leur cœur, le laissaient parler en taisant rien qu’un instant la raison, le mental conditionné, ils sauraient exactement ce qu’il en est.
Tout au fond, sous l’ego et ses vaines aspirations, sous les croyances, les idéologies et les faits scientifiques, ils savent…
J’ai grandi entourée de chats, de chiens et de chevaux. En tant que personne hypersensible et intuitive – ce qui n’est ni une sinécure, croyez-moi, ni un trait supérieur d’une quelconque manière – j’ai toujours été proche du vivant, attirée par la Nature, fascinée par l’intangible pour moi si réel, et le fait que les animaux aient une conscience identique à la mienne n’a jamais fait aucun doute.




Il n’y a pas besoin d’être scientifique ni d’avoir de diplômes pour observer, analyser et comprendre.
En premier lieu, j’invoquerai le fait que les animaux ont tous une personnalité propre et unique dès la naissance. S’ils n’étaient que des êtres bassement instinctifs, n’obéissant qu’à des neurotransmetteurs et aux nécessités de l’évolution imprimées dans leur code génétique, pourquoi cette personnalité ?

J’ai eu trois chattes, Brenda, Blanche et Cookie. Je trouve important que les chattes puissent connaitre la maternité avant d’être stérilisées. Dans chaque cas, j’ai observé des comportements maternels différents.
Brenda aime la paix et la tranquillité. Elle aurait voulu qu’il n’y ait jamais rien eu d’autre qu’elle et moi et une vie calme. Hélas, ce ne fut pas le cas, il y eu de nombreux déménagements et d’autres chats dans la famille, et elle le déplore. Elle s’est révélée être une mère consciencieuse mais peu affectueuse et pressée d’en avoir terminé. Elle a fait son boulot de maman très convenablement mais s’est réjouie du sevrage après lequel elle repoussait sans scrupule ses enfants d’un coup de patte, réclamant une paix qu’elle estimait bien méritée.
Blanche, sa fille, est une chatte insécurisée (peut-être par manque d’affection maternelle ?). Elle a toujours eu peu de confiance en elle, ce qui lui vaut bien des déboires : se conduisant en victime, elle provoque chez les autres chats un comportement de bourreau et se fait rosser plus souvent qu’à son tour. Elle se déplace en rasant les murs et pousse des cris démesurés à la moindre offense. En tant que mère, elle n’était jamais certaine de bien faire et je la voyais scruter les alentours d’une manière craintive car pour elle, le monde est un endroit hostile. Du coup, sa fille a développé de la débrouillardise et s’est sevrée très tôt. Attachante, délurée et indépendante, ce ne fut pas difficile de la faire adopter.
Je connaissais peu Cookie avant qu’elle devienne mère car elle est arrivée dans notre famille alors qu’elle avait à peine un an, non stérilisée, et est tombée enceinte très vite, mais j’ai reconnu là une chatte sûre d’elle qui ne se laisse pas facilement démonter ou marcher sur les pieds. Elle s’est avérée être une mère dévouée, très affectueuse et proche de ses enfants, même dans leurs jeux. J’ai été témoin de maints gestes tendre de sa part. Elle ramenait ses chatons contre elle et les serrait affectueusement. Elle ronronnait comme une mère chante une berceuse. Elle était très bavarde et communicative, « roucoulant » souvent à leur intention, et j’ai observé une grande variété d’intonations dans sa voix. Ses enfants ont grandi dans un sentiment de sécurité et dans l’insouciance. Recevant beaucoup d’amour inconditionnel, ne connaissant pas la peur ni le manque, ils ont développé très tôt leur propre personnalité : l’exploratrice, le pépère, le charmeur et le gaffeur.

Rien qu’avec ces trois expériences, je peux déduire que les animaux subissent, tout comme nous, des conditionnements liés à la « culture » dans laquelle ils sont plongés. Ils font leurs propres expériences de vie. Ils peuvent subir des traumatismes et se forger des traits de caractère ou des comportements impliquant un aspect psychologique certain.

J’ai noté cela chez les chevaux également. Mon cheval actuel, Kouros, est un retraité de l’Ecole Provinciale d’Equitation de Gesves, un endroit extrêmement compétitif et peu respectueux de la nature équine : les chevaux passent leur vie au box, ont très peu de relations entre eux (alors qu’ils sont une espèce grégaire), sont soumis à un régime de travail intense, voire au dopage en période d’examens, avec des cavaliers de tous niveaux ayant pour but de réussir dans un milieu ardu. Ces jeunes cavaliers ne peuvent se permettre de s’attacher à des chevaux relégués au statut d’instruments d’apprentissage jusqu’à ce que l’usure les mène à l’abattoir, pour la plupart d’entre eux. Seuls les chouchous comme Kouros, qui avait appartenu à l’ancienne directrice de l’établissement, sont mis à l’adoption.
Les chevaux d’école qui viennent de Gesves ont la réputation d’être « bruts », pas très futés ni sensibles, souvent éteints. Kouros ne correspondait pas du tout à cette description. Je l’ai perçu au premier coup d’œil et c’est ce qui m’a fait « craquer » pour lui. Il a un caractère solide et égal, une bonne appréciation de lui-même. Il était champion de dressage de haut-niveau et connaissait sa valeur. Par contre, il était totalement étranger à la relation affective. Il n’était pas habitué à n’ « appartenir » qu’à une seule personne. Le fait que je m’occupais de lui par plaisir et par amour l’intriguait, cela se voyait à sa posture, ses hésitations. Il attendait que j’exige de lui une performance alors que je n’espérais qu’un bon moment passé ensemble. Il lui a fallu une période d’adaptation avant d’accepter sa retraite de bonne grâce, fidèle à la solidité de son caractère. J’ai dû faire preuve de patience et de compréhension, et surtout, j’ai dû m’affirmer pour obtenir son respect, non à l’aide de gestes ou d’éclats de voix mais dans la considération que j’avais de moi-même. Nous sommes sortis du rapport de force, de toute idée de domination, et sommes entrés dans la collaboration. Nous avons grandis au contact l’un de l’autre. Il y des caractéristiques qu’il n’a jamais accepté de changer, d’autres qu’il cédait, comme des cadeaux.

Ayant évolué dans le milieu de la compétition équestre, j’ai vu de tout, je puis vous l’assurer, autant de la part des cavaliers que des chevaux. A cause de mon hypersensibilité, je n’ai pas poursuivi cette voie car ce qui se passe dans les coulisses d’un concours implique souvent beaucoup de cruauté d’une part, de souffrance de l’autre. Cette violence devenue ordinaire et normale que les habitués ne détectent même plus est pour moi insupportable. La détresse, invisible pour les autres, me crève les yeux. Je me suis en outre heurtée au politiquement correct qui, à mon avis, n’est rien d’autre que de l’hypocrisie et du déni. Lorsque je dénonçais un cas grave de maltraitance à un propriétaire de cercle équestre et que je m’entendais rétorquer : «Oui mais c’est un client dont les pensions rapportent et dont la réputation dans le milieu nous donne du crédit », je devais aller vomir et me payais ensuite chaque fois quelques nuits blanches. J’en ai beaucoup souffert, car ma perception accrue était souvent prise pour de la « sensiblerie »,  comme si les chevaux ne pouvaient, en fin de compte, pas ressentir de frustrations, de douleurs, de deuil, de sentiment de perte ou d’injustice. Comme si c’était moi qui projetais sur eux tout cela par anthropomorphisme.

Ô combien pratique, la manipulation du vocabulaire !
Si vous mettez une couverture à votre cheval en hiver, vous faites preuve d’anthropomorphisme et l’on rit de vous de bon cœur de la même manière que si vous lui attribuez des émotions. Où se trouve, dès lors, la limite entre l’anthropomorphisme et la perception d’une réalité ?

Sans doute faudra-t-il une étude scientifique pour l’expliquer…



Parmi les animaux que j’ai croisés dans ma vie, principalement chats et chevaux, j’ai constaté de l’amitié et de l’antipathie, de la générosité et de la jalousie, de la joie de vivre et de la déprime. J’ai même vu des chevaux développer un ego et devenir compétitifs. Ce sont-là des comportements observables et définissables, pas des surimpressions émotionnelles de la part d’un observateur. Les animaux domestiques, en tout cas ceux qui vivent en relation étroite avec les humains, pas ceux qui sont élevés industriellement, ont l’occasion de se développer émotionnellement, de se surmonter, de se tester, mais la vie sauvage n’est pas dépourvue d’expérience, au contraire ! Mais là, il nous faut évidemment le témoignage d’humains dévoués tels que Diane Fossey, Jane Goodal ou Mark Bekhoff.

Dernièrement, FR3 à consacré une émission à la communication intuitive, ou communication animale, une pratique avec laquelle je suis devenue familière. Les scientifiques interrogés niaient tout bonnement qu’une telle chose soit possible,  considérant cela comme un effet de l’imagination, un exercice d’auto-suggestion. Leur mépris n’est pas simplement issu du spécisme ancré dans l’idéologie occidentale judéo-chrétienne, mais du sexisme. En effet, la communication intuitive est l’apanage presque exclusif des femmes.
Donc, forcément, c’est dans leur tête que ça se passe !

Il fut un temps, à l’époque bénie pré-romaine et pré-chrétienne, où l’intuition des femmes était reconnue comme une qualité essentielle au bien-être de la communauté humaine. Elle était une faculté de discernement respectée.

Il m’a fallu longtemps pour accepter mon intuition, et encore plus pour dépasser son infantilisation dans notre société patriarcale. Aujourd’hui, je lui fais confiance plus qu’à toute autre notion, enseignement ou affirmation scientifique. Elle est non seulement la clé de la communication inter-espèces mais aussi le chemin vers toutes les connaissances que nous sommes prêts à appréhender.

Toujours est-il que par les instruments de mesure et l’intellect, il est certainement possible de prouver que les animaux ressentent des émotions semblables aux nôtres, mais c’est par l’observation et l’analyse personnelle, par le cœur et l’intuition, l’introspection sincère, le bon sens, en finalité, que nous pouvons savoir qu’ils ont une conscience, une âme, qu’ils sont ici pour expérimenter la vie, tout comme nous, et qu’il ne sont pas plus que nous destinés à l’emprisonnement, l’esclavage ou l’exploitation.

La science est fascinante, nécessaire, pratique, mais n’abandonnons plus notre pouvoir de perception et d’acquisition de connaissances aux seuls scientifiques (ou prêtres !).

Si l’humain a besoin d’une étude pour lui prouver l’immense tristesse, le déchirement que ressent une vache à laquelle on a enlevé le veau, pour lui prouver que la jument à laquelle l’on vient de faire une insémination artificielle ressent exactement la même chose qu’une femme abusée sexuellement, pour lui prouver que les animaux confinés dans des cages, privés de mouvements ou de rapports sociaux, souffrent de profonde dépression, d’un mal-être indescriptible, pour lui démontrer qu’il n’a certainement pas l’apanage de l’empathie et qu’il n’a pas du tout l’exclusivité de la compassion, lui qui en fait de moins en moins preuve, alors dans ce cas, l’humain, au lieu d’évoluer, a dégénéré bien en deçà de la moindre mouche ou étoile de mer.
Avoir développé une communication orale verbalement structurée ne fait pas de nous une race supérieure car, dans le processus, nous avons perdu tout autre moyen de perception et de communication. Ces moyens se retrouvent dans la Nature, chez les animaux. En tant que monitrice d’équitation, j’ai constaté à quel point les poneys et les chevaux réagissent encore plus au ressenti du cavalier qu’au leur. Ils détectent la peur, l’incertitude, les intentions, et surtout l’incohérence !

Et nous, en tant qu’être humain, nous nageons dans l’incohérence ! Nous passons notre vie à nous réprimer pour être conforme et nous en souffrons beaucoup, mais nous refusons de l’admettre. C’est pour cela que les thérapies avec les chevaux et les chiens ont autant de succès : tout en étant dépourvus de jugement, les animaux nous ramènent vers l’authenticité, et ça fait du bien.

Tiens, quand il s’agit de soigner les humains, les animaux sont tout à coup doués de sensibilité mais quand c’est pour nourrir les humains à outrance, faire briller leur ego en compétition ou leur assurer des bénéfices, ils en sont privés !
Quand on parle d’incohérence…




Vous voulez savoir si les animaux ont une conscience ? S’ils sont nos égaux ? Pas besoin de courir les articles de Sciences & Vie sur le sujet. Ça, c’est de la littérature pour « après », mais la prochaine fois que vous croisez un animal, n’importe lequel, attardez-vous sur ses yeux, son regard. Quelle expression y trouvez-vous ?

Qu’avez-vous ressenti lors de la connexion, juste avant de vous raisonner ?

C’est là que se trouve la réponse.


FB


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